Créé le : 03/08/2009
La pile à combustible (PAC) est un système de combustion électrochimique d'hydrogène et d'oxygène avec production simultanée d'électricité, d'eau et de chaleur. Comme dans une pile classique, on trouve deux électrodes (anode et cathode) qui sont ici chargées en hydrogène et oxygène, respectivement. Les spécificités concernent le catalyseur platine qui revêt les électrodes et l'électrolyte consistant en une membrane échangeuse de protons. A l'anode, l'hydrogène (H2) se sépare en deux protons (H+) et deux électrons. Les protons franchissent l'électrolyte et les électrons sont dirigés vers le circuit électrique via les plaques bipolaires chargées de la collecte du courant, but du système. Protons et électrons se recombinent ensuite à la cathode avec l'oxygène (O2) pour former de l'eau. INTERET ET APPLICATIONS Les raisons qui motivent l'engouement des chercheurs et des industriels autour des piles à combustible embarqués sont les suivantes : les rendements énergétiques sont élevés : de 40 à 60% (les systèmes de production d'électricité classiques possèdent un rendement rarement supérieur à 30 ou 40%) et il existe également une production associée de chaleur, laissant entrevoir des possibilités de cogénération (les applications « embarquées » sont peu concernées mais il existe un intérêt pour des applications domestiques), les émissions sonores sont faibles, les échappements gazeux (CO, NOx notamment) et particulaires sont faibles. Ces avantages par rapport au moteur à combustion ont bien sûr permis le développement de piles à combustible dans tous les secteurs industriels : « piles embarquées » : transports en général : engins spatiaux, navires, véhicules particuliers, bus, engins de manutention, véhicules agricoles « piles portables » : téléphone, ordinateur, caméra « piles stationnaires » : génération de chaleur et d'électricité pour le secteur résidentiel, le tertiaire (hôpitaux, écoles), les bâtiments publics (piscines, gymnases ). C'est la nature de électrolyte et donc la température de fonctionnement qui induit les différences nécessaires à l'utilisation de la PAC dans des secteurs variés. PEMFC Polymer Exchange Membran Fuel Cell Polymère solide 100Kw-10MW 60-100°C Portable, transport + nombreux prototypes + applications variées, mais principalement automobile - rendement faible (40%) - mauvaise valorisation de la chaleur PAFC Phosphoric Acid Fuel Cell Acide phosphorique 200Kw-10MW 200°C Stationnaire + technologie mûre + applications cogénération domestique - hydrogène obligatoire - rendement se dégradant avec le temps MCFC Molten carbonate Fuel Cell Sels fondus 500kW-10MW 650°C Stationnaire + rendement élevé (60%) + applications cogénération - technologie en phase recherche - mise en uvre délicate (corrosion) SOFC Solid Oxid Fuel Cell Céramique 1kW-10MW >700°C Stationnaire + applications industrielles (stationnaires) + alimentation variée + rendement global élevé (80%) - température élevée, mise en uvre délicate Figure 2 : les 4 principaux types de piles et leurs applications. GISTER Innovation, décembre 2004 La pile à membrane échangeuse de protons (PEMFC) est la plus prometteuse pour les transports, l'automobile et les engins mobiles. Des variantes existent : la pile à méthanol direct (DMFC) ou à éthanol direct (DEFC), qui consomment directement l'hydrogène contenu dans l'alcool. LUTTER CONTRE L'EFFET DE SERRE La pile à combustible n'est pas une source d'énergie primaire ; en ce sens elle n'augmente pas nos disponibilités, elle permet simplement une redistribution, une exploitation différente de l'énergie. Il est par exemple plus facile et moins onéreux, sur de longues distances, de transporter de l'hydrogène que de l'électricité. Cette notion d'énergie secondaire est particulièrement importante parce qu'elle permet de relativiser l'image d'énergie « propre » que l'on associe généralement à la PAC. En effet, les caractéristiques environnementales de la PAC sont étroitement liées au mode de fabrication de l'hydrogène. Et actuellement, 95% de l'hydrogène est issu des énergies fossiles Mais même issu d'énergies fossiles, la PAC possède de gros atouts ; si la production de CO2 demeure globalement, la pollution générée par les véhicules, elle, s'annule. Du coup, la qualité de l'air, au sein des villes notamment, s'améliore significativement, ceci profitant à une population largement majoritaire. Au fil du temps et des avancées technologiques, si l'utilisation de la PAC se généralise (automobile mais aussi industrie) et si la part de production d'hydrogène via des énergies renouvelables devient prépondérante, alors la PAC deviendra un acteur majeur de la lutte contre l'effet de serre. LA PAC EMBARQUEE : PROBLEMES ET SOLUTIONS TECHNOLOGIQUES Aujourd'hui, de nombreux problèmes techniques demeurent. Les principaux (ainsi que les solutions envisagées) sont récapitulés ci-après. DES COUTS TOUJOURS PROHIBITIFS Malgré la puissante recherche mobilisée autour de la PAC, malgré les nombreux prototypes réalisés et malgré les incitations de tous bords, la PAC embarquée patine Ce sont moins les écueils techniques que les prix de revient du système qui posent problème. Actuellement, les coûts des piles à combustibles pour automobiles, fabriquées à petite échelle, sont de l'ordre de 3 000 /kW, contre 30 à 50 /kW pour les moteurs à combustion traditionnels. Des simulations en situation de production de masse ont été réalisées et permettent d'espérer des coûts d'un ordre de grandeur inférieurs, de 100 à 200 /kW, mais toujours bien supérieurs aux solutions existantes. En ce qui concerne les Bus, la situation est meilleure, avec un rapport de coût PAC / classique de l'ordre de 5, seulement. Les prévisions sur le moyen terme sont également plutôt bonnes, avec un surcoût prévisionnel de 10% seulement en 2010. A l'heure actuelle, un grand nombre de villes s'équipe, à titre expérimental, de bus fonctionnant à la PAC. Les coûts de revient sont bien sûrs directement liées aux technologies mises en uvre. Et notre « niveau technologique » actuel nous limite cruellement : les technologies pressenties sont « nouvelles » et donc chères. Peut être faut-il changer radicalement notre fusil d'épaule et imaginer de toutes autres solutions technologiques, mieux adaptées ? Ici aussi les perspectives sont limitées. Tout ceci explique les espoirs déçus de nombreux constructeurs automobiles qui pensaient, au début du millénaire, proposer rapidement la commercialisation des premières automobiles à PAC (Renault et Ford notamment). Beaucoup d'entre eux se dirigent dorénavant, sans abandonner la PAC, vers d'autres technologies plus accessibles, comme les véhicules hybrides. Ces derniers sont « les véhicules de demain » ; le phase « prototype » est ici achevée, la commercialisation de ces véhicules explose. DES PROBLEMES TECHNOLOGIQUES TENACES Il existe de nombreux écueils techniques qui rendent la PAC délicate à mettre en uvre, et coûteuse. Les principaux sont listés ci-après. L'alimentation en hydrogène de la pile est le premier problème. Le combustible peut être soit stocké en l'état à bord du véhicule, soit directement produit en son sein. C'est ce que l'on appelle le « reformage embarqué ». On peut utiliser dans ce cas différents « carburants » (énergies primaires) : essentiellement hydrocarbures (oxydés en présence d'eau pour donner un mélange constitué principalement d'hydrogène et d'oxyde de carbone) et méthanol (généralement produit à partir de gaz naturel mais qui peut également l'être à l'aide de biomasse - déchets de bois ou ménagers - ou de charbon). Ce reformage embarqué a eu « le vent en poupe » au tout début des années 2000, jusqu'à ce que les inconvénients du système deviennent rédhibitoires : matériel embarqué volumineux et lourd, manipulation du méthanol délicate mais surtout : gain en émission de CO2 global (concept que les industriels appellent « du puit à la roue ») faible, voir graphe ci dessous : L'alimentation en oxygène de la pile est un écueil moins connu mais pourtant délicat. Le problème est d'obtenir une quantité suffisante d'oxygène ; en effet, l'air ambiant n'en contient que 20%, ce qui est insuffisant. Le niveau adéquat est obtenu avec une compression de l'air de 4 atmosphères, ce qui peut coûter près d'un tiers de la puissance fournie De plus cet air doit être purifié, ce qui rajoute encore une contrainte matérielle et économique. Le stockage de l'hydrogène est depuis le début un point sensible. Afin de conserver sans risque et sans perte d'hydrogène à bord du véhicule, ce dernier doit être maintenu à de très basse températures (-250°C) ou comprimé à plus de 350 bars. Dans le premier cas, la mise au point de réservoirs spécifiques particulièrement résistants (et limitant l'autonomie à environ 200 km) est nécessaire. Rien de concret n'existe pour l'instant dans ce domaine. Dans le deuxième cas, des réservoirs cryogéniques peuvent être envisagés mais la manipulation par les particuliers peut être délicate. Dans tous les cas, le stockage de l'hydrogène reste problématique en cas d'accident (secteur automobile essentiellement). Des efforts nouveaux et massifs doivent donc être portés pour sécuriser les réservoirs. Les ressources en platine constituent un problème au niveau de la fabrication de la pile. Chaque pile nécessite près de 100 grammes de ce métal qui n'est actuellement produit que très parcimonieusement : 200 000 kg/an (essentiellement en Afrique du Sud). Du coup la production de piles ne peut dépasser 2 millions de voitures par an (soit le niveau français actuel, en supposant que toute la production de platine soit utilisée pour les PAC !). Cette production peut bien sûr être augmentée, et des filières de recyclage développées, mais cela prendra du temps, beaucoup de temps Le poids et le volume de la PAC sont bien sûr une contrainte pour les applications embarquées et notamment surtout dans le segment automobile. Le poids du véhicule se paie directement en énergie perdue et le volume en défaut d'habitabilité, point fort et argument commercial massue des voitures modernes Couplée avec un reformeur lui même très volumineux, la PAC affecte encore plus les performances et le confort du véhicule. Ce problème est bien sûr beaucoup moins aigu pour les bus, engins agricoles, de chantiers ou autres. L'alourdissement du véhicule n'est pas un problème rédhibitoire et des solutions peuvent être trouvées plus aisément pour « loger » un système de pile à combustible. Ainsi les bus Mercedes « Nebus » embarquent piles et réservoirs d'hydrogènes sur le pavillon du bus. CONCLUSION, PERSPECTIVES DE DEVELOPPEMENT A début des années 2000, Bill Ford, Président de Ford, était catégorique : « La Pile à combustible mettra un terme, finalement, au règne d'un siècle du moteur à combustion ». Les énormes avantages entrevus associés à des problèmes techniques sous estimés, parce que mal connus, ont généré un engouement généralisé pour la PAC. Politiques et industriels ont vu à la fois la solution au problème de réchauffement climatique (la part du transport dans la production de CO2 s'élève à 25%) et un renouveau du marché automobile. Ici débute « l'ère des prototypes ». Peu de temps après, à peine quelques années, les premiers résultats sont plutôt décourageants. Le trio : prix de revient élevé / écueils techniques importants / dégradation de l'habitabilité (pour l'automobile) met en berne la plupart des efforts de développement, dans le secteur automobile, tout au moins. Pourtant la PAC n'est pas morte, ce n'est même qu'un commencement. Le secteur des transports en commun évolue assez rapidement mais plusieurs décennies seront nécessaires à sa mise au point dans le secteur automobile. Dans tous les cas, si d'autres techniques ne la supplantent pas avant, le défi du véhicule fonctionnant à l'hydrogène, silencieux et propre, sera relevé. Les industriels l'ont bien compris. La stratégie abordée est très intelligente : en attendant la PAC, les constructeurs misent sur des techniques plus accessibles mais surtout compatibles avec la pile Ainsi se développent les véhicules hybrides : les avancées sont modulaires et pourront être associées sans délai à la PAC, lors de son avènement : seul le mode d'alimentation en électricité changera