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Alain Rousset : « Redonner des marges de manœuvre à nos PME en les accompagnant »

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16/04/2018

Dans le N°241 de mars de Cetim Infos, le Président de la région Nouvelle-Aquitaine revient sur le rôle clé des régions dans le soutien au développement des PME industrielles. Voici l’interview réalisée à la veille du salon Global Industrie dans son intégralité.

 

Cetim Infos : Avec la loi NOTRe, les régions sont reconnues comme des acteurs clés du développement économique et industriel. Pourquoi les régions sont-elles le bon échelon pour traiter ces questions ?

Alain Rousset : Parce que la grande région est porteuse d’une dynamique créatrice et d’accompagnement de tous ses territoires ! En effet, l’échelon régional constitue un cadre particulièrement adapté pour nouer des partenariats technologiques et économiques entre les entreprises, ainsi que les acteurs de la recherche et de la formation. L’échelle régionale permet notamment de conjuguer logiques de taille critique et de proximité. En un mot, faire de l’aménagement du territoire. De plus, ce grand cadre régional favorise une véritable fertilisation croisée des acteurs et des compétences, permettant de conduire des démarches ambitieuses et structurantes. Cela se matérialise par les clusters, mais aussi par nos programmes « Usine du Futur » et « Croissance Premium », ou encore notre politique de contractualisation !

 

C.-I. : Comment leurs actions doivent-elles s’articuler avec la politique nationale ?

A. R. : En vérité, l’enjeu est la coopération et la coordination entre régions. C’est ainsi que nous participons aux réunions du « Déploiement Régional de l’Alliance Industrie du Futur », où les membres de ce groupe de travail et les régions discutent des dispositifs à mettre en œuvre. De plus, un travail a été piloté par l’Association des Régions de France (ARF) pour faire l’analyse de notre organisation et de nos actions respectives. Des recommandations de bonnes pratiques ont été mises au point sur la gouvernance, le financement ou l’accompagnement des entreprises. Et puis, nous effectuons une veille sur la situation de l’industrie en France, les actions engagées par le gouvernement, les régions, et les autres partenaires du développement économique en France. Sans oublier les initiatives internationales ! Je constate qu’aujourd’hui, par ailleurs, la quasi-totalité des régions françaises a engagé un programme « Usine du Futur ». La forme précise peut varier d’une région à l’autre, mais ces programmes ont tous pour but de soutenir la modernisation du tissu de PME et d’ETI dans les régions.

 

C.-I. : En France, le tissu industriel est composé en majorité de PME. Comment concentrer efficacement les efforts sur ces typologies d’entreprises ?

A. R. : A travers son programme « Usine du Futur », la Nouvelle-Aquitaine a souhaité redonner des marges de manœuvre à nos PME, les accompagnant vers l’excellence opérationnelle et environnementale, ainsi qu’en soutenant leur transition vers l’usine numérique et connectée. Ce programme ambitieux a été mis en place pour les PME et ETI, de 10 à 5 000 salariés, possédant au moins un site de production en Nouvelle-Aquitaine. L’enjeu est de briser le cercle vicieux « manque de marge - manque d’investissement - manque de productivité », et de mieux répondre aux nouvelles exigences du marché, en particulier par de nouveaux business model, plus souples et agiles. Cette transformation suit trois axes clairement identifiés : technologie, énergie et environnement, organisation et management. Et elle ne se fera, bien sûr, qu’avec les salariés ! Sens, engagement, organisation, compétences, formation sont donc des thèmes-clés de ce programme sur 10 ans.

 

C.-I. : En particulier, les actions visant à promouvoir une technologie phare ou une filière localement, ou encore la transformation de PME en ETI sont-elles pertinentes à vos yeux ?

A. R. : Ces actions sont tout à fait pertinentes ! Notre région est riche de sa diversité et de ses territoires. Cet atout nous permet en particulier de contribuer activement à la structuration de clusters en Nouvelle-Aquitaine. Car ceux-ci peuvent s’inscrire dans une logique verticale de filière, à l’image de notre cluster cuir autour des métiers du cuir et du luxe, ou dans une logique transversale « multi-filières » – comme notre nouveau cluster autour de la croissance bleue. Ces deux exemples illustrent parfaitement la manière dont l’action volontariste de la région sur ces thématiques renforce les filières économiques sur les territoires et boostent la compétitivité des PME, en privilégiant des approches collaboratives. On évite les logiques de silo et de cloisonnement ! En outre, comme l’Allemagne, nous nous sommes dotés en 2017 d’un nouveau dispositif « Nouvelle-Aquitaine Accélérateurs » pour nos PME et nos ETI, en partenariat avec Bpifrance, visant à donner à nos entreprises les plus prometteuses les outils et les moyens de leur croissance. Ce dispositif doit permettre à nos PME de croître pour être mieux armées face à la concurrence internationale et devenir, demain, nos futures ETI.

C.-I. : Votre région a promu très tôt la notion d’industrie et d’usine du futur. Votre plan porte-t-il ses fruits ? Quelles en sont les prochaines étapes ?

A. R. : En effet, pionnière de cette démarche, la Nouvelle-Aquitaine a engagé son programme « Usine du Futur » dès février 2014. La spécificité de ce programme est une démarche pragmatique, de terrain, qui dresse un diagnostic de la situation des entreprises, soutient leur plan d’actions à court et moyen termes : aide à l’investissement, à la formation, au conseil, à l‘embauche, à la R&D. Ce programme les accompagne sur les moyen et long termes à travers des parcours thématiques : organisation et management, robotique, fabrication additive, numérique, usine durable. Enfin, ce programme met en place de structures d’animation territoriale inter-entreprises et l’organisation d’évènements : séminaire annuel, conventions ou encore évènements thématiques. Au final, nous avons aujourd’hui plus de 400 entreprises qui sont entrées dans le programme, et nous comptons en avoir diagnostiquées et accompagnées 600 d’ici 2020 !

 

C.-I. : Un Cetim Sud-Ouest vient d’être créé dans votre région. Comment cette initiative peut soutenir votre action en faveur du développement industriel en Nouvelle-Aquitaine ?

A. R. : Le Cetim vise à mieux répondre au besoin de montée en gamme de nos 2700 entreprises néo-aquitaines de la filière mécanique. Entreprises qui sont d’ailleurs à 95% des entreprises de moins de 20 personnes, je le rappelle ! Deux axes de travail se dégagent. Dans un premier temps, il s’agit de la mise en place d’un cadre de collaboration entre la Nouvelle-Aquitaine et le Cetim à l’échelle régionale, justement. Ce partenariat enrichira la dynamique régionale autour de l’« Usine du Futur », renforcera la sensibilisation autour des procédés innovants en mécanique et contribuera à l’enrichissement des compétences de l’écosystème d’innovation régionale (plateformes technologiques), tout en transférant vers les PMI en lien avec les structures de recherche et les plateformes régionales existantes. Le deuxième axe de travail constitue l’émergence et la formalisation de projets collaboratifs et collectifs à forte dimension technologique sur l’ensemble du territoire de Nouvelle-Aquitaine. Les premiers sujets en instruction sont notamment de nouveaux procédés de soudage (en partenariat avec Metallicadour), l’intégrité de surface et usinage (Metallicadour, ENIT, ESTIA, I2M), la robotisation du parachèvement et du polissage (Safran, Metallicadour), les contrôles du futur en ligne (Safran, Metallicadour, CEAtech, I2M, ENIT, Aerospace valley, Alpha-RLH).

 

C.-I. : Les efforts des régions pour entretenir et développer leurs tissus industriels locaux ne risquent-ils pas de contribuer à une compétition qui pourrait avoir un impact négatif sur l’industrie française dans son ensemble ? 

A. R. : Au contraire ! Je suis persuadé qu’il est vertueux que chaque région se saisisse des enjeux de l’usine du futur, de la modernisation de l’outil de production et du maintien et de la création d’emplois dans les territoires. Car il s’agit davantage d’une saine émulation entre régions qu’une compétition frontale qui serait contre-productive. Nous nous tirerons ainsi mutuellement vers le haut ! La prise en compte de ces enjeux, ainsi que les nombreux projets qui sont conduits sur les différents territoires, tant au niveau de l’investissement productif que du capital humain, est au contraire une chance pour l’industrie française dans son ensemble, dont les bénéfices commencent à se faire sentir sur la compétitivité, la croissance de nos entreprises, et la création d’emplois.

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